Qu’est ce que le libéralisme ? L’exemple des retraites

Introduction

Le principe du système de retraite français est simple : pour bénéficier d’une retraite à taux plein, il faut en principe remplir deux conditions1 :

  • Avoir passé un certain âge (64 ans dorénavant) ;
  • Avoir cotisé un minimum de trimestres ;

Créé en 1941 par le régime de Vichy23 et généralisé après la libération, le système de retraite français est dit « par répartition » : les personnes qui travaillent cotisent pour ceux qui sont à la retraite.

Autrement dit, l’argent des actifs est directement pris via les cotisations et envoyé sur le compte en banque des retraités.

Intrinsèquement, le système de retraites français est un système dans lequel « tout le monde paye pour tout le monde ». Certains qualifient même ce système de « pyramide de ponzi »4, mais cette démonstration sera l’objet d’un autre article.

Emmanuel Macron, un libéral ?

Emmanuel Macron est souvent qualifié par la presse de « néolibéral » ou de « libéral ».

Que ce soit concernant la réforme des retraites5, ou de manière plus générale6, nombre d’auteurs et de commentateurs se plaisent à qualifier le Président de la République de la sorte.

Pourtant, il n’en est rien.

Explosion de la dette publique, prélèvements obligatoires indécents, politique keynésienne constante, distribution impulsive de chèques en tout genre. Rien de tout cela ne permet de dire qu’Emmanuel Macron serait un libéral.

Mais, avant toute chose, comment définir le libéralisme ?

Libéralisme contre collectivisme

Le libéralisme peut être défini comme la doctrine qui met en son centre la liberté de l’individu ainsi que sa capacité à effectuer pour lui-même ses propres choix.

En cela, cette doctrine s’oppose classiquement au socialisme ou au collectivisme.

On peut définir le collectivisme comme « un mode d’organisation sociale fondé sur l’appropriation des moyens de décision, au nom de tous, de la majorité, de la généralité. Par extension, système qui admet une intervention de l’État (ou d’autres groupements autoritaires) dans le domaine économique, politique et social en édictant des lois contraignantes. »7

Pour aller plus loin, nous pouvons nous tourner vers Alexis de Tocqueville, qui, dans De la démocratie en Amérique, définit brillamment ce qu’il appelle le « despotisme démocratique8 » :

Nos contemporains sont incessamment travaillés par deux passions ennemies : ils sentent le besoin d’être conduits et l’envie de rester libres. Ne pouvant détruire ni l’un ni l’autre de ces instincts contraires, ils s’efforcent de les satisfaire à la fois tous les deux. Ils imaginent un pouvoir unique, tutélaire, tout-puissant, mais élu par les citoyens. Ils combinent la centralisation et la souveraineté du peuple.

Ce despotisme démocratique est en réalité une excellente définition de la manière dont le collectivisme s’est aujourd’hui emparé d’un pays comme la France.

Nous pouvons donc ajuster notre définition et définir le collectivisme comme le système où un pouvoir certes élu, décide d’une manière « tutélaire », c’est-à-dire d’une manière où les citoyens ne peuvent plus décider par eux-mêmes, les règles qui s’appliquent à l’ensemble de la population.

Explorons davantage cette question à partir de la réforme des retraites.

Le système des retraites vu sous l’angle du libéralisme

Comment qualifier le système de retraite par répartition ?

Comment qualifier un système où un pouvoir, certes élu, se permet de décider pour l’ensemble de la population la manière selon laquelle gérer sa propre retraite.

Le système des retraites tel qu’il est conçu actuellement consiste à prendre une partie substantielle des revenus de ceux qui travaillent pour les donner aux retraités.

En cela, une partie des revenus des citoyens est « confisquée » par l’État : cet argent ne pourra donc pas être utilisé directement par les citoyens-contribuables.

Dès lors, peut-on qualifier une telle manière de gérer les retraites de « libérale » ?

Pour rappel, nous avons défini le libéralisme comme la doctrine mettant en son centre les choix effectués par les individus, et le collectivisme comme la doctrine utilisant la contrainte démocratique pour permettre à l’Etat de décider à la place des individus.

Dès lors, le système de retraite par répartition est-il inspiré du libéralisme ou du collectivisme ?

Comment définir un système qui, par un vote au parlement, permet de modifier l’âge de départ à la retraite pour tous les citoyens ?

Comment définir un système dans lequel il nous est impossible d’effectuer un opt-out : c’est-à-dire par exemple de ne plus cotiser et en échange de renoncer à vos droits à la retraite.

Force est de constater que le système de retraite par répartition est donc bien plus inspiré du collectivisme que du libéralisme.

Ainsi, par exemple, que penser d’un candidat à la présidentielle qui nous viendrait nous promettre la retraite à 60 ans ? Ce candidat est un collectiviste pur et simple.

Que penser d’un candidat qui viendrait nous promettre la retraite à 65 ans ? Ce candidat est un collectiviste stakhanoviste.

Que penser d’un candidat qui viendrait nous promettre la retraite à 67 ans ? Ce candidat est un collectiviste, sûrement de la pire espèce.

Dans tous les cas, tous sont collectivistes. Et ce car le système par répartition est, de toute façon, collectiviste.

Le cas de la retraite par capitalisation

Dans ce contexte, comment qualifier ceux qui souhaitent mettre en place un système de retraite par capitalisation ?

D’abord, qu’entend-t-on généralement, par « système par capitalisation » ?

On entend par cette expression, généralement, « un régime de pension par capitalisation à caractère contributif ».9

Le simple nom de système par « capitalisation » peut inciter un citoyen imprudent à penser qu’un tel système est forcément inspiré du libéralisme.

Pourtant, revenons à nos définitions :

Le libéralisme serait la doctrine mettant en son centre les choix effectués par les individus, et le collectivisme serait la doctrine utilisant la contrainte démocratique pour permettre à l’État de décider à la place des individus.

Si l’État décide, fût-ce démocratiquement, de s’approprier une partie de vos revenus en vue de les placer, sans votre consentement individuel, dans un ensemble d’actions et d’obligations que vous n’aurez pas choisies, peut-on considérer cela comme du « libéralisme » ?

Encore une fois, il s’agit de collectivisme.

Tout homme politique qui proposerait une telle politique serait donc un collectiviste.

Certes, un collectiviste plutôt intelligent dans la mesure où les marchés financiers offrent généralement les meilleurs rendements sur le long terme10; mais un collectiviste quand même.

La solution libérale

La solution libérale est toujours, par essence, non coercitive. C’est-à-dire, sans contrainte pesant sur les citoyens.

Ainsi, une solution libérale consisterait simplement à ce que l’État abroge le système de retraite par « répartition » et laisse les salariés disposer pleinement du fruit de leur travail.

Les travailleurs seraient alors libres de dépenser cet argent, de l’épargner, de l’investir, de le placer avec plus ou moins de risque.

Chacun serait responsable de la préparation de sa propre retraite.

La plupart des travailleurs placeraient la majorité de leur capital sur 25 ou 30 ans, en profitant des intérêts composés.11 À ce sujet : le lecteur avisé qui souhaite se convaincre de la puissance d’un tel système peut effectuer en une minute une simulation sur un calculateur de placement par intérêts composés.12 Dans un système où chacun pourrait librement disposer du fruit de son travail, l’argent placé soigneusement et profitant de la capitalisation (avec par exemple un taux de 3%) permettrait sûrement à chacun de partir à la retraite bien avant l’âge de 64 ou même de 60 ans.13

Enfin, rien n’empêcherait d’ailleurs ceux qui le souhaiteraient de se regrouper au sein d’une organisation ad hoc et de mettre en place, volontairement, contractuellement, c’est-à-dire entre participants volontaires uniquement, un système de retraite par répartition.

Si le système de retraite par répartition est si efficace que ça, pourquoi serait-il forcément nécessaire de l’imposer d’une manière coercitive ?

Le retour du réel

L’impasse démographique du système par répartition

La presse généraliste a déjà amplement relayé que la relance démographique était l’immense angle mort de toute réforme des retraites.14

En effet, un système par répartition reposant uniquement sur la spoliation des actifs au profit des retraités, la question démographique aurait dû être au cœur du débat sur la réforme des retraites.

Comme d’habitude, la gauche française15 ainsi que le pouvoir en place, dans leur immense sagesse, ont estimé qu’il n’y avait pas de place pour débattre de la question démographique. Certes, François Bayrou a évoqué ce sujet mais s’est justement désolé d’être seul dans son camp à l’évoquer16.

Mettre en place un système par répartition est déjà une stupidité.

Mais, vouloir pérenniser un tel système sans aborder sérieusement la question de la démographie est quasiment criminel …

Un bref tour d’horizon de l’étranger

Force est de constater l’attachement des français au système de retraite tel qu’il est actuellement.17

C’est pourquoi il faudrait probablement envisager un système hybride, tel que celui existant en Suisse.

Le système de retraite suisse repose sur « 3 piliers » :18

  • Le premier pilier est organisé par répartition, mais ne permet d’assurer aux retraités suisse qu’une infime part de leur retraite, c’est-à-dire le minimum vital pour payer un loyer et se nourrir ;
  • Le deuxième pilier est organisé par capitalisation. La première moitié du pilier est constituée d’une prévoyance privée obligatoire, payée par les employeurs. La seconde moitié d’une prévoyance privée facultative. Ce deuxième pilier doit permettre au travailleur suisse de maintenir son niveau de vie lors de sa retraite ;
  • Le troisième pilier est géré par les individus eux-mêmes, comme bon leur semble ;

En somme, l’effort est réparti entre l’État (d’une manière coercitive), les entreprises (d’une manière semi-coercitive), et les individus (d’une manière non coercitive).

Le système britannique repose d’abord sur une state pension : les fonds alimentant cette state pension sont collectés de manière coercitive mais reposent sur de faibles montants. Autrement dit, les sommes aspirées par l’administration sont faibles et le montant de retraite versé est aussi faible. L’idée est d’assurer aux travailleurs un montant minimal pour payer un loyer et un peu plus. Cet argent ainsi collecté est géré par capitalisation.19

Le reste de la pension de retraite repose sur un système non obligatoire et individuel, où chacun cotise pour soi-même, s’il le souhaite.

Conclusion

Alors que notre système est à bout de souffle et que la question démographique ne pourra jamais se résoudre en un coup de baguette magique, ne pourrait on pas par exemple s’inspirer des systèmes étrangers ?

La Suisse ou le Royaume-Uni sont-ils des enfers absolus desquels les citoyens s’enfuient quotidiennement pour venir en France ?

Un système créé en 1941, par le pire régime que nous ayons connu, doit-il véritablement constituer notre horizon indépassable ?

Au-delà du combat politique, il faut d’abord réarmer les esprits contre le pire parasite que nous connaissons : la pensée socialo-communiste.

  1. https://www.cleiss.fr/docs/regimes/regime_france3.html#:~:text=ayant%20atteint%20l’%C3%A2ge%20l%C3%A9gal,condition%20de%20dur%C3%A9e%20d’activit%C3%A9. ↩︎
  2. https://www.historia.fr/la-cgt-vichyet-de-gaulle ↩︎
  3. https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/1941-lorsque-le-marechal-petain-annoncait-la-retraite-par-repartition ↩︎
  4. https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_de_Ponzi ↩︎
  5. https://www.humanite.fr/social-eco/reforme-des-retraites/emmanuel-macron-globe-trotteur-neoliberal-760999 ↩︎
  6. https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/emmanuel-macron-toujours-et-encore-le-neo-liberalisme-915134.html ↩︎
  7. https://fr.wikipedia.org/wiki/Collectivisme_politique ↩︎
  8. https://iphilo.fr/2018/04/09/alexis-de-tocqueville-le-despotisme-democratique-un-pouvoir-immense-et-tutelaire/ ↩︎
  9. https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMAnalyse/2761#:~:text=Il%20s’agit%20d’un,67%20ans%20d’ici%202022. ↩︎
  10. https://time.com/personal-finance/article/best-long-term-investments/ ↩︎
  11. https://fr.wikipedia.org/wiki/Int%C3%A9r%C3%AAts_compos%C3%A9s ↩︎
  12. https://www.gerezmieuxvotreargent.ca/calculatrices/calculatrice-interets-composes/ ↩︎
  13. Un article plus détaillé viendra démontrer cela. Cependant, il suffit ↩︎
  14. https://www.lexpress.fr/politique/retraites-la-politique-nataliste-angle-mort-de-la-reforme-ITJNZVTC6VAXFFFM732NSFHULA/ ↩︎
  15. https://www.lefigaro.fr/politique/assemblee-nationale-lachez-nos-uterus-cingle-sandrine-rousseau-dans-l-hemicycle-20230216 ↩︎
  16. https://www.leparisien.fr/politique/demographie-il-faut-avoir-plus-denfants-et-accueillir-des-personnes-dautres-pays-plaide-bayrou-16-05-2021-YVLSVLEUJBDERJR7JCMQ42KBYU.php ↩︎
  17. https://www.gereso.com/actualites/2021/05/03/les-francais-face-a-la-retraite-opinion-et-perception-du-systeme-de-retraite/ ↩︎
  18. https://www.bsv.admin.ch/bsv/fr/home/assurances-sociales/ueberblick/dreisaeulensystem.html ↩︎
  19. https://london.frenchmorning.com/fiches/la-retraite-au-royaume-uni/state-pension-ou-workplace-pension-deux-systemes-de-retraite/ ↩︎

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